Les « Gestes Deplaces » Du Vicaire

By Timothee Boutry
Le Parisien
January 18, 2013

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Cathedrale d’Angouleme (Charente). Le pere Patrick Braud, 55 ans, (ici en 2008) va comparaitre pour des agressions sexuelles sur des jeunes filles mineures. | (PhotoPQR/« Sud Ouest »/Isabelle Louvier.)

C’etait un cure tres apprecie dans sa communaute. Un personnage charismatique en qui les parents avaient toute confiance. Beneficiant encore du soutien de plusieurs paroissiens, le pere Patrick Braud, 55 ans, l’ancien vicaire general de la cathedrale d’Angouleme (Charente), devra pourtant comparaitre devant le tribunal correctionnel pour des agressions sexuelles « par personne ayant autorite ».

Au terme de ses investigations, la juge d’instruction, dont l’ordonnance de renvoi a ete signee le 7 decembre, a identifie trois victimes mineures, de jeunes adolescentes dont deux avaient moins de 15 ans au moment des faits. Certains des agissements denonces remontent a la periode 1996-1998. « Mon client reconnait des gestes deplaces, mais il conteste le caractere sexuel des agressions. Il vit tres mal cette histoire », plaide Me Patricia Coutand, l’avocate du pere Braud.

Il a d’abord reconnu les faits

Les premieres plaintes contre l’ecclesiastique remontent a janvier 2009 lorsque trois jeunes filles — deux s?urs et une de leur amie qui se verra finalement objecter la prescription — denoncent avoir subi plusieurs agressions sexuelles. Il s’agit a chaque fois d’adolescentes elevees dans un milieu catholique traditionnel et qui, souvent mal dans leur peau, avaient su trouver aupres du cure une oreille attentive. Au cours de la procedure, un des plaignantes evoque les « sentiments partages » que lui inspirait cet homme : « Je l’admirais, il me dominait moralement et intellectuellement, et d’un autre cote il me degoutait par les actes sexuels qu’il m’imposait. » Cette jeune fille, agee de 17 ans en 1996, parle de caresses sur les cuisses, de baisers dans le cou, de succions de doigts et de caresses sur la poitrine. Et meme un viol digital qui se serait produit lors d’une viree a la campagne. Sa s?ur evoquera des caresses mammaires au domicile familial au cours d’une lecon de violon.

Les premieres revelations dans ce dossier ont reveille de douloureux souvenirs chez une quatrieme jeune fille. Identifiee apres un appel anonyme passe par son compagnon, H. va se plaindre de caresses deplacees pretendument commises a l’arriere d’un bus apres un voyage paroissial en 2006. Parallelement, de nombreux fideles manifestent publiquement leur soutien au pretre mis en cause.

Apres avoir globalement reconnu les attouchements sexuels en garde a vue, le pere Braud s’est ensuite retracte au cours de l’instruction. Mais l’argument d’une eventuelle entente entre les jeunes filles a ete balaye par la juge. L’enquete « vient contredire l’hypothese d’accusations malveillantes ou mensongeres ainsi que celle d’une collusion, evoquee par le mis en examen, qui semble difficilement soutenable […] au regard de l’authenticite des traumatismes et l’expression de grandes souffrances, constatees par leurs proches et par les expertises psychologiques », ecrit la magistrate.

« Mes clientes, pour lesquelles il a ete tres difficile de porter plainte contre quelqu’un qu’elles admiraient, esperent que ce proces leur permettra de tourner la page definitivement », confie Me Fabien Picchiottino, l’avocat des trois premieres plaignantes. Depuis sa mise en examen, Patrick Braud a rejoint le nord de la France ou il n’exerce plus.