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Religion : Les Curés Rebelles Laissent Des Femmes Célébrer LA Messe By Matthieu Delacharlery France Soir November 22, 2011 http://www.francesoir.fr/actualite/religion/religion-cures-rebelles-laissent-des-femmes-celebrer-messe-159013.html
Des curés normands ont lancé un appel à l'Eglise pour tenter de vivifier leurs paroisses en autorisant les femmes et les hommes mariés célébrer la messe. Entre la bibliothèque immaculée de blanc à l'architecture contemporaine et le dédale de logements sociaux qui l'entourent, l'église Sainte-Catherine semble presque hors du temps, comme endormie dans l'épaisse brume qui recouvre le quartier populaire du Grammont, à Rouen. Il est 10 h 30. La cérémonie va bientôt débuter. Des silhouettes s'engouffrent avec empressement dans l'enceinte de cette petite chapelle datant XIIe siècle. En l'absence de prêtre ce dimanche matin, c'est un habitant du quartier, Eugène Diedhiou, un laïc (*) marié et père de 3 enfants, qui préside la célébration dominicale en compagnie de deux femmes retraitées engagées bénévolement dans la vie de l'église. De peur de délaisser ses paroissiens, le père Paul Flament, 78 ans, a dû se résoudre à l'instauration de ces assemblées dominicales en l'absence de prêtre dans son église, une « Adap » dans le jargon ecclésiastique. « Il s'agit d'une célébration sans prêtre, résume Eugène Diedhiou, qui dirige une association à caractère social dans le quartier. Lorsque le père n'est pas disponible, des pratiquants non ordonnés assurent l'office à sa place. » De la lecture des passages de la Bible en passant par les prières et les chants religieux, sans oublier la communion de l'hostie, consacrée par un prêtre lors d'une messe précédente, la célébration ressemble à s'y méprendre à une messe traditionnelle. Crise des vocations « A Rouen, nous sommes plusieurs prêtres à autoriser des femmes à prononcer le prêche de temps en temps en raison du manque de prêtre, affirme le père Paul Flament. Bien que l'Eglise ne prévoie pas de faire prêcher des laïcs, encore moins des femmes, cela fait plus de trente ans que ce genre de choses se déroule dans mon église. » Et la pratique serait selon lui beaucoup plus courante qu'on ne l'imagine : « En Alsace, en Bretagne, même dans ces régions pourtant réputées pratiquantes », assure-t-il. Comme beaucoup d'autres, le diocèse de Rouen subit de plein fouet la crise des vocations. « Dans certaines paroisses, notamment dans les campagnes et dans les banlieues, le prêtre doit parfois s'occuper d'une dizaine d'églises en même temps. Certaines églises restent parfois portes clauses pendant plus d'un mois », constate Claudine Zafarane, qui assure le prêche lors des Adap. Le Vatican a donc autorisé l'instauration de ces assemblées dominicales, mais de nombreux évêques s'y refusent, craignant « un mélange des genres » dans l'esprit du fidèle : « Ces cérémonies sont marginales et nous souhaitons qu'elles conservent un caractère exceptionnel. Il est vrai que les laïcs ont une place de plus en plus importante dans l'Eglise mais ils ne doivent pas confondre leur rôle avec celui du prêtre, estime Mgr Bernard Podvin, porte-parole de la Conférence épiscopale des évêques de France. Nous préférons regrouper les fidèles au sein de grandes paroisses. Certes, il y a moins de messes qu'auparavant, mais ces dernières sont souvent plus dynamiques. » Un "appel à la désobéissance" Mais le prêtre « rebelle » ne désarme pas. Il souhaite même aller encore plus loin. Avec le soutien de vingt-trois prêtres du diocèse de Rouen, le père Paul Flament a signé « l'appel à la désobéissance » initiée au printemps par un groupe de 329 ecclésiastiques autrichiens avides de réformes. Parmi leurs revendications, l'ordination des femmes et des personnes mariées, la communion aux divorcés et l'autorisation aux pratiquants non ordonnés, hommes comme femmes, de prononcer des sermons et de diriger des paroisses pour pallier la crise des vocations… Une centaine de paroissiens ont ainsi apporté leur soutien au père Paul Flament. « Aujourd'hui, l'Eglise est au pied du mur. Il y a de moins en moins de prêtres et les petites églises qui avaient un rôle de proximité ferment les unes après les autres », constate Gilbert, un paroissien de 66 ans. Pourtant, des solutions existent. « Pourquoi ne pas autoriser des hommes ou des femmes mariés à entrer dans les ordres, par exemple. Des personnes avec un métier, qui pourraient ainsi prendre en charge ces petites paroisses abandonnées, faute de prêtres, insiste le curé de Sainte-Catherine. » "Une image inhumaine de l'Église" Toutefois, il regrette également que son appel n'est pas trouvé d'échos parmi la nouvelle génération de prêtre. « Aujourd'hui, l'Eglise est freinée dans sa vitalité par tout un courant de jeunes prêtres qui ont tendance à se replier sur eux-mêmes, à reprendre la pastorale du passé, avec un comportement qui s'apparente parfois à une forme d'intégrisme. On observe également ce même phénomène de repli dans d'autres religions, comme dans l'islam, par exemple. » Dans le diocèse de Rouen, tous ne partagent évidemment pas sa prise de position. A l'image du père Geoffroy de la Tousche, curé de la paroisse Notre-Dame du Nouveau-Monde et de l'Oison à Elbeuf : « On donne l'impression qu'on ne parle pas de ces questions au sein même de nos instances. C'est tout le contraire […] Et il y a un risque de désunion entre les prêtres, et ça, ce n'est pas bon », regrettait-il mi-octobre dans une interview accordée au journal local Paris Normandie. Contacté par la rédaction de France-Soir, l'évêché de Rouen n'a pas souhaité s'exprimer sur le fond de cet appel à la désobéissance et sur son approbation par des religieux de son diocèse. Lors de la réunion des évêques de France, qui se déroulait début novembre à Lourdes, la plupart de ces questions n'ont pas été débattues, et cela au grand dam des évêques rouennais. « L'Eglise catholique a une réflexion profonde sur ses questions depuis des siècles mais a également ses propres convictions. Et des positions claires ont d'ores et déjà été clairement énoncées sur ces sujets. Ces quelques prêtres véhiculent une image inhumaine de l'Eglise qui est pour le moins caricaturale », regrette Mgr Bernard Podvin, porte-parole de la Conférence épiscopale des évêques de France. |
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