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  Abus Sexuels Dans L'Eglise: Un Silence Organisé

RTBF
September 14, 2010

http://www.rtbf.be/info/belgique/religion/affaire-dutroux-de-leglise-il-faut-faire-la-lumiere-sur-ce-silence-organise-253627

Le président de l'ex-commission Adriaenssens a rendu public son rapport ce vendredi. Un rapport qui soulage les victimes. Certains observateurs dénoncent un "silence organisé". Faut-il mettre en place une commission parlementaire ? Les avis sont partagés.

Les victimes d'abus sexuels se sentent soulagés par la publication du rapport de la commission Adriaenssens. Tous les invités présents sur le plateau de Mise au Point sont d'accord sur le fait que ce rapport a eu l'effet d'une bombe. Il y a désormais une certaine forme de prise de conscience de l'opinion publique. A vrai dire, "tout le monde savait, mais personne ne connaissait l'ampleur de ces faits". Tommy Scholtès, prêtre et directeur de l'agence Cathobel estime que l'Eglise peut avoir honte. Mais souligne le courage de l'Eglise à affronter la souffrance. Pour Tommy Scholtès, parler d'un "Dossier Dutroux de l'Eglise" est une comparaison gênante.

Gabriel Ringlet, ancien vice-recteur de l'UCL et prêtre lui-aussi, accepte cette comparaison forte. Mais il va plus loin. Il s'agit pour lui d'un problème qu'il juge plus grave car plus structurel. "Marc Dutroux était un pervers relativement isolé. Ici, je suis frappé par l'ampleur géographique". Une constatation qu'il ne fait pas pour enfoncer l'Eglise mais plutôt pour l'"encourager car ça ne fait que commencer, il faut aller jusqu'au bout".


"Silence organisé" et "omerta scandaleuse"

Walter Van Steenbrugge, avocat d'une trentaine de victimes d'abus parle, lui, de "silence organisé". Selon lui, il faut également se concentrer sur "les mécanismes qui ont soutenu, organisé le silence sur les faits". L'avocat estime que la justice n'a pas réagi comme il fallait. Sur le plateau de notre JT, il évoquait hier samedi le fait que le juge d'instruction investigue en fonction du principe de "non-assistance en danger". Walter Van Steenbrugge insiste pour que "les abuseurs et les autorités qui ont 'manipulé' pour que le silence soit de mise soient punis pour leur faute". Seul moyen pour que les victimes puissent être dédommagées.

Pierre Galand, le président du Centre d'Action Laique, parle d'"omerta scandaleuse" et souligne le traitement spécial auquel l'Eglise aurait eu droit. Et plaide pour une séparation nette entre la sphère privée de l'Eglise et publique de l'Etat. Gabriel Ringlet souhaite que la politique et la justice fasse leur travail jusqu'au bout, "tout comme l'Eglise". "Il est clair qu'elle a caché quelque chose". Le prêtre ne parle pas d'"omerta" mais plutôt de "lavage de linge sale en famille". Une mentalité qui n'est "plus possible aujourd'hui", estime Gabriel Ringlet.


"Il ne faut pas que l'arbre Vangheluwe cache la forêt Adriaenssens"

Le dossier Vangheluwe a lui aussi été abordé. Tommy Scholtès se dit "déçu qu'il ne perde pas son état clérical. Il est gravement pêcheur. Il ne peut plus être prêtre", estime-t-il. "Seul le Vatican peut, aujourd'hui, faire un geste", continue le prêtre.

Gabril Ringlet, lui, est "déçu par le communiqué. Il fallait une parole forte pour les victimes". Et insiste encore une fois pour que "l'arbre Vangheluwe ne cache pas la forêt du rapport Adriaenssens". "Il faut s'attaquer aux causes", affirme-t-il.

Mais comment en est-on arrivé là ? Le célibat des prêtres revient souvent sur la table. Gabriel Ringlet affirme que le célibat "devrait être un choix libre". Ce qui pose problème selon lui, c'est le fait que le célibat soit imposé aux prêtres. Ce qui, pour le prêtre, "peut conduire à l'immaturité sexuelle".


Une commission d'enquête parlementaire ?

Le Parlement doit-il s'emparer de ce dossier de pédophilie ? "Il faut une commission d'enquête parlementaire", affirme l'Ecolo Olivier Deleuze. Selon lui, c'est le seul moyen de savoir où "l'Etat a été faible". Car il "apparaît clairement qu'il s'agit d'un dérapage de tout un système et qu'il faut empêcher que cela se reproduise".

L'idée d'une commission d'enquête parlementaire ne fait pas l'unanimité. Le socialiste Thierry Giet estime qu'une telle commission "vicierait" l'enquête judiciaire en cours. Il plaide plutôt pour que Pieter Adriaenssens vienne présenter son rapport au Parlement. Il souligne également l'absence de lieu d'écoute pour les victimes. Même son de cloche du côté du cdH où Francis Delpérée doute de l'utilisation d'une telle procédure exceptionnelle, bien que le Parlement ne puisse rester indifférent. Le libéral Daniel Bacquelaine entend réaffirmer le droit des victimes. Il faut "aller plus loin dans la reconnaissance des victimes actuelles et éviter nouvelles victimes demain".

Allonger le délai de prescription ou s'attaquer aux racines du problème ?

C'est à nouveau le délai de prescription qui crée le débat. Cédric Visart de Brocarmé, procureur général de Liège, doute de l'allongement de cette période. "Serait-il raisonnable de mener une enquête 50 ans après les faits ?", s'interroge-t-il. D'autant plus qu'"un changement de loi n'aurait pas d'effet rétroactif", rappelle Francis Delpérée. Notons que Joëlle Milquet lors de l'émission "L'Indiscret" s'est dit, elle, ouverte au débat sur le rallongement du délai de prescription pour ces faits.

Olivier Deleuze estime, lui, qu'il est préférable de prendre le problème à la racine : "Pourquoi n'avons-nous rien su ? Quel rôle joue la Justice ?". Néanmoins, Daniel Bacquelaine (MR) va relancer les discussions à ce propos en commission de la Justice. Il avait déjà proposé en 2007 un allongement de ce délai pour les crimes d'abus sexuels sur mineurs.

 
 

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